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Les deux à la neige (pas toujours)
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18 novembre 2006

Sauce Traviata

Cette sauce à spâââ-ghetti qui se mélange aux pâââââ-teuh…

Et ben voilà, depuis hier, j’ai de la sauce à spaghetti dans les oreilles. Elles pourraient tout aussi bien être pleines de tampons (à moins que ce ne soit des serviettes hygiéniques?) mais non, c’est de la sauce. Vous vous souvenez de cette pub en noir et blanc, avec une femme sur un voilier ? D’accord je vous ramène à une époque où ça se pourrait bien que je ne savais même pas ce qu’il pouvait bien y avoir dans les paquets de Vania ou de OB. N’empêche, dès que le chœur des gitanes a commencé à chanter, pouf, je ne pensais plus qu’à ça. Pareil avec les amis de Violetta et Alfredo qui trouvent qu’il est bon de faire la fête jusqu’au petit matin : c’est comme s’ils me parlaient d’un gros plat de pâtes à la bolognaise, tout ça en crinoline et smoking. Classe. En plus, moi je vous le dis, les amis, après une bonne guinsse, un crapain ou une frite mayo, c’est encore mieux que les pâtes.

Cette sauce à spâââ-ghetti qui se mélange aux pâââââ-teuh…

Et oui, c’est le risque quand on va voir les classiques de l’opéra… La Traviata, c’est un peu comme un concert de Patrick Juvet : on ne connaît pas tout son répertoire mais il y a toujours bien un tube pour faire frissonner la foule. Allez, tous en chœur ! Sauf qu’ici, les tubes, on ne les connaît pas grâce aux soirées nostalgie que TF1 programme quand l’imagination des producteurs vient à manquer (ça fait toujours plaisir) ni même par la magie des fonds d’escarcelle des DJ du Pilsor, du Malibu, du Forst, du Succès, du Duc d’Artois ou du Palais de la bière (c’est ma tournée et c’est celle de Claude F. et de Patrick J., de Début de Soirée et du Lac du Connemara). Non, non, les tubes de la Traviata, on les connaît par la pub, et ça, c’est pire. Cette sauce à spâââ-ghetti qui se mélange aux pâââââ-teuh… Pauvre Verdi.

Sinon, entre les tubes, y avait tout le reste que je ne connaissais pas. Ma culture en opéra c’est un peu, comment dire ?, c’est un peu comme un champ subventionné par la PAC. En friche. Donc, j’ai quand même eu l’esprit libre de sauce tomate et de protections féminines pendant un bon bout de temps, si libre qu’à un moment ma tête a chu sur l’épaule de Phiphi. Gentil Phiphi. Allez, j’exagère, ma tête n’a reposé que quelques minutes (l’entracte m’a réveillée). Il faut dire, franchement, le scénographe ne s’est pas foulé, ni le directeur de casting, ni le costumier finalement (on mélange les époques mais à part une petite fente dans la jupe, on n’invente pas grand-chose).

Pour la scénographie, ça se résume à une structure de fer rouillé, genre échafaudage arte povera, que le machiniste déplace à chaque tomber de rideau pour nous faire croire qu’on a changé de lieu. Mais je ne suis pas dupe, c’était bien la même scène. Faut pas me prendre pour une biesse. Je ne suis pas contre le minimalisme mais alors il faut que le rien apporte un plus. C’est paradoxal mais si c’est minimaliste par principe, je dis non. Si c’est par mesure d’économie, alors, à la rigueur, je veux bien l’admettre. Mais bof, bof, bof. D’autant que les accessoires, c’est-à-dire quatre chaises, deux banquettes, une table, deux fauteuils en rotin (pour quand Alfredo et Violetta sont dans leur maison de campagne : ben oui, des meubles de véranda !), d’autant que les accessoires, donc, ils étaient tout gris eux aussi. Même pas drôle.

Pourtant ça n’aurait pas fait de tort de mettre un peu de couleur et de matière là-dedans. Je vous explique.

Violetta est une courtisane, l’une des plus belle femmes de Paris, elle a la ville a ses pieds et tout ce que Paris compte d’hommes encore verts et point désargentés voudrait bien convoler avec elle en injustes noces. Pourtant, comme dit Caro L qui a un très bon accent, « Povera donna, sola, abbandonata in questo popoloso deserto che appellano Parigi... » Violetta se noie dans les fêtes n’a jamais connu l’Amour et a la tuberculose. Et vi, Violetta n’est autre que la Dame aux camélias que Verdi a empruntée à Dumas fils. Mais l’Amour lui tombe dessus, c’est Alfredo qui s’en vient lui déclarer sa flamme. Ouhlala, elle frémit, elle hésite, abandonner le tourbillon des fêtes, les amants, le luxe et les bals masqués owhé, owhé… Mais Alfredo, mama mia, che ragazzo… Tomber de rideaux, on retrouve les amoureux à la campagne, en banlieue parisienne, avec leurs fauteuils en rotin, heureux et tutti quanti. Evidemment, leur paix bobonne va se troubler. Je vous passe les détails, juste la fin de l’histoire, que ça ne vous empêche pas de dormir. Nos héros se sont séparés, Violetta est reprise par sa vilaine toux (normal, quand on se balade en nuisette de soie épaisse comme du papier à cigarette), elle est rentrée à Paris sans le sou et sans son Alfredo et elle se meurt dans son petit lit. A la limite, elle est contente de mourir parce que la vie sans son chéri, c’est pas terrible. Donc voilà, elle va mourir et, ding-dong, v’là-ti pas Alfredo qui se ramène et qui lui dit qu’il l’aime, qu’il y a eu maldonne et que c’est vraiment idiot de s’être séparés comme ça. Du coup, Violetta, toute bînaise d’avoir retrouvé son chéri ne veut plus mourir. Mais à l’époque, la médecine n’est pas tellement au point et donc elle meurt et c’est bien triste. Tout ça en chantant à fond les poumons ; c’était sûrement une tuberculose des pieds qu’elle avait.

Bref. Voilà où je veux en venir : vous imaginez aisément le tableau, Alfredo et Violetta sont des espèce de jeunes premiers, ils cueillent encore l’aérienne fleur de l’âge, Aphrodite et Ephèbe, beaux comme des gravures de mode, hou lala, j’en ai des vapeurs. Et bien c’est là que le scénographe et l’accessoiriste auraient dû être briefés par le directeur de casting parce que si Violetta et Alfredo chantent à la perfection (vraiment, Yali-Marie Williams est merveilleuse), question silhouette, c’est pas trop ça. C'est même pas ça du tout. Tous les deux sont un petit peu trop gras pour le rôle, ce n’est pas tout à fait l’image qu’on se fait d’une beauté parisienne et de son noble amoureux, jeune, tumultueux, passionné, sincère, hou lala, j’en ai des vapeurs. En rajouter et vêtir Alfredo d’un costume clair tendance Gatsby le Magnifique, habiller Violetta en épais tutu de tulle rouge, non, non, et non. Surtout quand il y a autour d’eux des seconds rôles et des figurants qui prennent du coup des allures d’osseux top modèles.

Mon commentaire peut paraître idiot parce que, après tout, tout ce qu’on leur demande c’est de jouer et de chanter (en plus, en vrai, la soprano est indéniablement fort belle), le problème c’est qu’on n’y croit pas une seconde à ce joli petit couple et au statut de Violetta de plus belle femme de Paris. A la santé précaire de surcroît, bien cachée sous ses bonnes joues et ses cuisses de Rubens. Donc, voilà, moi, si le directeur m’avait mise au parfum, à la place du scénographe et de ses échafaudages j’aurais mis des ors et des tissus, des fleurs et des couleurs, des tapis et du cristal. De la chantilly tout autour, quoi, pour noyer les gros macarons qui chantent.

C’eut été délicieux.

J’ai l’air de râler mais c’était bien, hein. En tout cas, Phiphi était ra-vi. Et les petits aussi, ils tapaient presque en rythme tous les deux. Alors quand ils seront plus grands, pour leur initiation et pour leur plaisir, ils iront avec Tata Caro écouter chanter les macarons. Et ptêt que je viendrai aussi.

Cette sauce à spâââ-ghetti qui se mélange aux pâââââ-teuh…

Tiens, je me ferais bien une assiette de bolo ce soir.

A bientôt les amis ! (Si vous êtes encore là.)

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Commentaires
P
Merci pour l'image, chère Marlah, "du caviar dans un satchô d'frites", c'est tout à fait ça !<br /> Et quelle bonne idée que ces costumes en poils de cheval. Il y a un marché, c'est sûr. <br /> <br /> Et merci pour être restés jusqu'au bout, vous tous qui commentez. Vous êtes des braves parmi les braves.
M
C'est vrai que ce qui est surtout bien à l'opéra, c'est les habits. S'ils n'ont pas de beau zabi, ya pas d'intérêt... d'accord ils chantent bien mais c'est pas la tout de chanter bien... encore faut-il bien chanter dans un beau zabi sinon ça ne donne rien... ça fait caviar dans un satchô d'frites! <br /> Tiens, ça te dirait pas qu'on fasse une asbl de costume de théâtre en poil de cheval ?<br /> ouuuu, ça c'est un bon filon ...
L
... je suis encore là moi aussi! Et des comptes-rendus pareils, j'en redemande! En-core! En-core! (et sinon, ça te prends combien de temps d'écrire toutes ces bêtises pas bêtes du tout?)
C
Oui, oui je t'ai lu jusqu'au bout... de ton assiette de spâââ-ghetti bolo et je comprends tout à fait ta frustration de ne pas voir de tarte à la crème, de dorure et du kitch bien kitch à cet opéra!
M
Rien qu'à lire ta prose, j'ai attrapé une indigestion! Je vais me passer de mes pâtes du mardi et du vendredi pendant un petit temps. Vivement Dominique A la semaine prochaine!
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